Les Français très favorables à un meilleur accompagnement de la fin de vie
Rédigé par Laure Hanggi , le 24 October 2014 à 15h40
Les Français demandent un meilleur accompagnement de la fin de vie.
Le Comité National Consultatif d'Éthique (CCNE) a rendu son rapport sur la question de la fin de vie, suite à l'analyse des différents débats publics ayant eu lieu sur le sujet ces deux dernières années. Si certains points font consensus, beaucoup de questions demeurent sur leur mise en application et le sujet de l'euthanasie reste épineux.
Un constat accablant de la fin de vie en France
Chargé d'éclairer le monde politique sur les grandes questions éthiques, le Comité Consultatif National d'Éthique (CCNE), dénonce en ouverture de son rapport le « scandale que constitue depuis 15 ans le non accès aux droits reconnus par la loi ». Il condamne en effet « l'abandon d'une immense majorité des personnes en fin de vie, et la fin de vie insupportable d'une très grande majorité de nos concitoyens ».
Le principal reproche réside dans l'inégalité d'accès aux soins palliatifs, délivrés lorsqu'une personne est atteinte d'une maladie grave, chronique ou terminale. Près de 80 % des personnes qui devraient en bénéficier n'y ont pas accès. Ainsi, près de 8000 personnes par an meurent aux urgences, et 90 000 en EHPAD (maisons de retraites) à cause du manque d'accompagnement. Selon le CCNE, ces soins palliatifs ne devraient pas uniquement être mis en place dans les dernières semaines de vie, mais beaucoup plus tôt. À en croire l'organisation, les Français ont l'impression que leur volonté n'est « pas respectée ».
Ainsi, il ressort de ce rapport que la volonté des patients n'est pas assez prise en considération ; par les textes et par les médecins, et que leurs droits ne sont pas assez appliqués.
Des point de convergence sur le respect de la volonté des patients
S'il y a un point où les Français sont unanimes, c'est sur le respect de la volonté des malades. Ainsi, il est souhaité que la procédure collégiale (prise de décision suite à la concertation du médecin avec des membres du personnel médical) soit réellement une procédure de groupe, afin que les médecins et les proches soient sur un pied d'égalité dans la prise de décision, lorsque le patient n'est plus en état de décider pour lui-même.
Pour rendre moins complexe ce genre de situation, le CCNE préconise que les directives anticipées, qui permettent aux malades de se prononcer sur leur souhait, ou non, de poursuivre les soins si la question venait à se poser, deviennent contraignantes. Autrement dit, contrairement à aujourd'hui où elles ne sont qu'indicatives, les médecins seraient obligés de les prendre en considération. Enfin, l'autre demande « très largement partagée » par les Français est le droit d'obtenir une sédation profonde (médicaments provoquant l'endormissement) lorsque le patient se trouve en phase terminale de fin de vie, ou lorsque l'interruption du traitement a été décidés. Pour le Pr Régis Aubry, chef du service des soins palliatifs à l'hôpital de Besançon, membre du CCNE et président de L'Observatoire national de la fin de vie (ONFV), on pourrait assister à l'apparition d'un « nouveau droit. Celui de pouvoir (lorsqu'on est en phase terminale d'une maladie grave) bénéficier d'une sédation quand bien même on n'a pas un symptôme réfractaire ou de l'inconfort ».
Des clivages et des questionnements
Comme l'indique Jean-Claude Ameisen, président du CCNE, « toutes ces demandes partagées concernent le respect de la volonté exprimée par la personne ». Mais, si elles font l'unanimité sur le papier, les modalités de leurs applications font beaucoup plus débat. C'est notamment le cas de la sédation terminale, à la source de nombreuses craintes. S'agit-il d'accompagner la personne jusqu'à sa mort ou d'accélérer son décès ? « Tout dépend de l'usage que l'on en fait » remarque le Pr Régis aubry, qui reconnaît quand même que la ligne entre les deux est « très fine », et que certains y voient une euthanasie camouflée.
En effet, les clivages et les oppositions restent très fortes sur les questions de l'assistance au suicide et de l'euthanasie. Ce blocage empêche toute législation et condamne à l'immobilisme certaines situations, comme on a pu le voir avec Vincent Lambert, qui se trouve dans un état de conscience minimale depuis 5 ans et dont la famille se déchire sur la poursuite ou non des soins.
La Société Française des Soins Palliatifs, qui regroupe des professionnels, des bénévoles d'accompagnement et des patients, a jugé, quelques heures après la publication du rapport, que le constat du CCNE était « sévère mais juste ».
Un projet de loi devrait être soumis au Parlement autour du mois de mars 2015.