Elargissement du FNAEG, la CNIL émet des réserves
Rédigé par La Rédaction , le 23 November 2018 à 10h30
Aujourd'hui, l'identification se fait avec de l'ADN non-codant.
Le FNAEG ou fichier national des empreintes génétiques compte près de 3 millions de profils génétiques et 480 000 traces d’ADN non identifiées. Il est utilisé pour faciliter l’identification et la recherche d’auteurs d’infractions ou de personnes disparues. Un amendement adopté le 6 novembre dernier prévoit d’élargir son champ d’application.
Une distinction devenue obsolète entre ADN non-codant et codant
Le FNAEG a été créé en 1998 pour ficher les délinquants sexuels. Depuis, il a fait l’objet de quelques amendements pour élargir son champ d’application. En 2001, il a intégré les profils génétiques d’individus condamnés pour des crimes graves. Puis, en 2003, il a été étendu aux profils génétiques de tout individu mis en cause dans les crimes et délits d’atteintes aux biens ou aux personnes.
Le nouvel amendement, proposé par le député Didier Paris et voté en commission des lois de l’Assemblée nationale, porte sur l’élargissement du FNAEG à tout type d’ADN. A ce jour, il n’utilise que les segments non-codants d’ADN afin d’identifier un individu. En principe, il ne permet pas de reconnaître certaines caractéristiques comme l’origine ethnique.
Pour le ministère de la Justice, cette distinction entre ADN non-codant et codant n’a plus lieu d’être à cause des progrès de la science. Même les segments non-codants sont susceptibles de véhiculer des informations sur la personne. Ainsi, cet élargissement va renforcer la fiabilité du fichier et réduire les risques de comparaison positive.
Des risques graves pour la vie privée et la protection des personnes
La CNIL ou Commission nationale de l’informatique et des libertés ne partage pas ce point de vue. Dans un communiqué, la CNIL a tenu à rappeler en premier que la limitation du FNAEG aux segments d’ADN non-codants a été justifiée par la volonté de garantir la proportionnalité du fichier. Or, les dispositions de cet amendement soulèvent de nouveaux enjeux.
Ainsi, la CNIL alerte sur les risques graves que présente une telle modification du FNAEG. Les mesures envisagées portent atteinte à la vie privée et à la protection des personnes. Elles peuvent en effet être ciblées sur la base de similarités morphologiques ou de correspondance génétique partielle. Auparavant, une réflexion concertée et approfondie doit être menée sur la question.
Un autre amendement va ainsi être déposé pour autoriser la conservation de ces informations sur les segments d’ADN codants dans un fichier autre que le FNAEG. A la fois personnelles et sensibles, ces informations restent accessibles à tout moment en cas de besoin. Par contre, elles ne peuvent être utilisées automatiquement dans le cadre d’autres enquêtes.