L'obésité coûterait près de 2000 milliards de dollars à l'économie mondiale
Rédigé par Laure Hanggi , le 21 November 2014 à 14h25
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L'obésité fait désormais parti des fléaux les plus coûteux de l'humanité.
À l'heure où un rapport du cabinet de conseil McKinsey affirme que le phénomène de l'obésité, en hausse exponentielle, coûte 2000 milliards de dollars par an à l'économie mondiale, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) met en cause notre système alimentaire qui encourage l'obésité et ne parvient pas à éradiquer la faim.
L'obésité : un fléau de santé publique et économique
Aujourd'hui, près de 2,1 milliards de personnes dans le monde sont en surpoids ou obèses, soit 30 % de la population mondiale (contre 857 millions en 1980). Selon un rapport du cabinet de conseil McKinsey, publié le jeudi 20 novembre 2014, la moitié des adultes sera touchée par cette situation d'ici 2030 (notamment dans les pays développés). Mais comme le relève ce rapport, l'impact de l'obésité n'est plus que sanitaire, il est désormais économique.
L'obésité coûte en effet à l'économie mondiale 2 000 milliards de dollars (1 600 milliards d'euros) annuellement, soit l'équivalent du PIB de l'Italie ou de la Russie. La croissance mondiale se retrouve donc amputée de 2,8 points de PIB, par un fléau sanitaire qui coûte désormais autant, voire plus, que la cigarette, les guerres, le terrorisme ou le changement climatique.
« Aucun pays n'est parvenu à réduire son taux d'obésité entre 2000 et 2013 » remarque McKinsey. Les pays qui sont le plus touchés aujourd'hui sont toujours les mêmes que ceux du début des années 2000, bien que le phénomène ait pris de l'ampleur chez les économies émergentes.
L'obésité est à l'origine de 5 % des décès annuels, soit 2,8 millions sur les 59 millions de personnes perdant la vie chaque année, selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS).
Un système alimentaire qui encourage l'obésité et qui échoue à éradiquer la faim
Lors de la deuxième Conférence internationale sur la nutrition (CIN2) organisée à Rome du 19 au 21 novembre 2014, l'OMS et la FAO (organisation des Nations-Unies s'occupant de l'alimentation et de l'agriculture) ont dénoncé un système alimentaire trop industrialisé échouant à éradiquer la faim, tout en favorisant l'obésité. « Une partie de notre monde déséquilibré meurt encore de faim. Et une autre partie se gave jusqu'à l'obésité, à tel point que l'espérance de vie recule à nouveau », a ainsi déclaré Margaret Chan, directrice général de l'OMS, lors de l'ouverture de la Conférence.
Si le nombre de personnes souffrant de la faim a baissé depuis les années 1990 (plus d'un milliard alors), près de 805 millions de personnes ne mangent toujours pas à leur faim dans le monde. Surtout, le phénomène de la « faim invisible » s'est également développé, 2 milliards de personnes souffrant aujourd'hui de carences en vitamines, en iode ou en fer. La « faim invisible » tue ainsi chaque année 1,1 million d'enfants parmi les 3,1 millions mourant de sous-alimentation.
« Le système alimentaire mondial ne fonctionne plus, à cause de sa dépendance à une production industrialisée de nourriture toujours moins chère et mauvaise pour la santé », a relevé Mme Chan, qui a également insisté sur le fait que dans certaines grandes villes d'Afrique ou d'Asie, il était plus économique de faire venir de la nourriture industrielle que des produits frais des alentours. « Il y a déjà [pourtant] assez de nourriture pour que tout le monde mange correctement », a affirmé José Graziano da Silva, directeur général de la FAO.
Il faut révolutionner le système et les normes alimentaires
Comme le rappelle le rapport McKinsey, l'obésité est une question complexe qui nécessite qu'on l'affronte sur plusieurs fronts pour en venir à bout. Le document cite ainsi 74 recommandations pour s'attaquer au problème, telles que la réduction des portions dans les fast-foods, l'introduction d'aliments sains dans les écoles et la nécessité d'éduquer les parents sur les questions alimentaires. Le rapport insiste également sur la nécessite d'une « réponse coordonnée » des gouvernements, commerçants et acteurs du secteur agro-alimentaire, qui pourrait permettre à 20 % d'obèses de redescendre à un poids normal en moins de dix ans.
John Connelly, représentant de l'industrie de la pêche et présent à la conférence au titre du secteur privé, insiste également sur le fait que la production alimentaire n'est pas la seule coupable. En effet, l'activité physique a beaucoup diminué, si ce n'est disparu, dans certaines franges de population, notamment dans les pays développés.
« Les pays du monde entier ont la créativité nécessaire pour travailler avec la société civile, la communauté scientifique et le secteur privé pour trouver les bonnes solutions » a affirmé Mme Chan. Pour José Graziano da Silva, les engagements doivent se transformer en résultats afin que notre génération soit celle « qui aura relégué la faim et la malnutrition dans l'histoire ».
Les représentants des 172 pays présents à cette conférence (CIN2) ont adopté, mercredi 19 novembre, une « Déclaration de Rome » portant sur la nutrition, ainsi qu'un « Cadre d'action » comprenant 60 recommandations pour lutter à la fois contre la sous-alimentation, les carences alimentaires et l'obésité.