Transhumanisme : « l'augmentation » de l'Homme par la technologie est-elle utopique ?
Rédigé par Laure Hanggi , le 20 November 2014 à 15h02

Quel avenir pour le partenariat entre l'humanité et la technologie ?
De ce jeudi 20 novembre jusqu'au Samedi 22 se tient le colloque TransVision, premier du genre en France à aborder les enjeux et les implications du transhumanisme. Ce courant d'idée, qui prend de plus en plus d'ampleur, croit au potentiel de la technologie dans l'amélioration des conditions de vie de l'Homme et dans l'augmentation de ses capacités... jusqu'à l'immortalité.
Le transhumanisme : la technologie pour sauver l'humanité
Le Colloque Transvision, qui s'est ouvert ce jeudi 20 novembre et qui se clôturera samedi 22 est le premier grand événement organisé en France sur les questions du transhumanisme. Jusqu'alors assez marginal et se limitant à de petites réunions, ce courant de pensée est en en train de prendre de l'ampleur en France. Le colloque affiche ainsi complet, témoignant de la curiosité et de l'intérêt que suscitent les questions liées au transhumanisme.
Mais qu'est-ce que le transhumanisme ? Né dans les années 1980 en Californie (États-Unis), ce courant de pensée repose sur l'idée que l'Homme peut être « amélioré » à l'aide des technologies. Le mouvement soutient ainsi toutes les recherches s'intéressant aux moyens de lutter contre les maladies et le vieillissement, mais également celles visant à améliorer les capacités humaines, ainsi que la conquête spatiale. Pour les transhumanistes, la vieillesse n'étant qu'une maladie pouvant être vaincue, la technologie devrait permettre à l'Homme d'atteindre l'immortalité. Pour Marc Roux, le président de l'AFT-Technoprog (l'association française transhumaniste qui a organisé l'événement), « l'évolution humaine n'a aucune raison d'être terminée. On commence à peine à se rendre compte que nous sommes arrivées à une maîtrise technique et un savoir biologique tels que nous pouvons désormais choisir d'orienter notre évolution ».
Le mouvement n'en est cependant qu'à ses débuts en France (40 à 400 adeptes selon Marc Roux), au regard de l'ampleur du mouvement outre-Atlantique, aux États-Unis. Là-bas, les adeptes du mouvement travaillent pour Google ou Facebook, enseignent dans des universités et financent des instituts de recherche spécialisés.
Quelles avancées sont mises en avant ?
Quel scénario envisagent les transhumanistes pour dépasser la condition mortelle de l'homme par la technologie ? Comme l'explique Laurent Alexandre, fondateur de Doctissimo.fr et président de DNA Vision (spécialisée dans le séquençage ADN), ce scénario repose sur l'intelligence artificielle des ordinateurs, qui selon les transhumanistes, pourrait devenir égale à celle de l'Homme vers 2030. « Imaginez alors que l'on puisse numériser vos connaissances et votre pensée, et que l'on puisse mettre tout cela dans un robot (…) : vous seriez immortel [et] transhumain ».
Ces avancées technologiques sont généralement regroupées sous le sigle NBIC pour : Nanotechnologie, Biotechnologie, Informatique et sciences Cognitives. Pour Marc Roux, « la convergence technologique entre ces domaines clés rend déjà possible les perspectives transhumanistes ».
Des recherches s'inscrivant au sein de ces thématiques existent déjà, telles que celle sur les cellules souches qui vise à comprendre le mécanisme de leur renouvellement ou bien la démocratisation du séquençage de l'ADN. Les progrès effectués dans le domaine de la robotique sont également à lier à ce mouvement de pensée. La miniaturisation des composants électroniques et le développement de l'informatique pourraient permettre la mise au point de prothèses motorisées, qui seraient connectées à notre système nerveux, si ce n'est notre cerveau. Des projets comme le Human Brain Project, financé par l'Union Européenne, ou le Connectome aux États-Unis ont déjà pour mission de modéliser par informatique le fonctionnement du cerveau.
Quels enjeux pour le transhumanisme : faut-il s'inquiéter ?
Le transhumanisme n'a cependant pas que des adeptes. Beaucoup s'inquiètent de voir la technologie envahir le quotidien, au point que l'Homme pourrait en devenir dépendant. C'est le cas de groupes anti-technologie, tels que Pièces et main d'oeuvre, qui a menacé de perturber le déroulement du colloque.
Le transhumanisme français cherche néanmoins à se démarquer de son homologue américain, qui ne se fixe aucune limite. La Fondation américaine Alcor Life Extension propose en effet aux personnes, pouvant se le permettre financièrement, de conserver leur corps et de le cryogéniser, afin de les « ressusciter » si jamais la technologie le permettait un jour.
L'AFT-Technoprog veut plutôt mettre en avant la manière dont la transhumanisation pourrait entrer au service de la justice sociale. Serons-nous tous, en effet, égaux face à ces avancées scientifiques ? « On insiste fortement sur la nécessité du libre choix et du respect de la dignité de chacun. À l'avenir, que nous soyons augmentés ou pas, il ne doit pas y avoir de discrimination », explique Marc Roux.
Des questions éthiques se posent quand même, face à cette possibilité d'extension de la vie : tout le monde y aura-t-il accès ? Comment cela sera-t-il fait ? Ce qui est sûr, c'est que les moyens sont mis par les grandes compagnies dans le secteur de la santé et des nouvelles technologies. Les fondateurs de Google, comme nombre d'entrepreneurs de la Silicon Valley, sont des adeptes du transhumanisme. Un des membres les plus éminents du mouvement, Ray Kurzweill, dispose, lui, de gros moyens alloués par la Nasa et Google.
Le marché de « l'augmentation » de l'Homme semble donc avoir de beaux jours devant lui.