Inégalité d’accès aux soins en Europe : 2/3 des femmes enceintes sans soins prénataux
Rédigé par Clémentine Billé , le 16 May 2014 à 15h00
Les femmes et les enfants sont plus vulnérables, et plus touchés par l'inégalité d'accès aux soins
A l’approche des élections européennes, l’ONG Médecins du monde publie un rapport sur les inégalités d’accès aux soins en Europe. Les conclusions sont alarmantes, et le rapport pointe la mauvaise prise en charge des femmes enceintes et des marginaux ou minorités de la société.
Précarité, absence d’accès aux soins : les femmes et les enfants sont les plus vulnérables, et les plus touchés par ce fléau. Médecins du monde (MdM) publie, à l’approche des élections législatives européennes, un rapport qui demande aux gouvernements et institutions européennes de « garantir des systèmes de santé nationaux universels, solidaires et équitables, ouvert à toute personne vivant dans l’Union Européenne ».
Femmes et enfants, plus vulnérables mais moins soignés
Médecins du Monde s’appuie sur 29 400 consultations menées en 2013 dans des centres de soins destinés au plus précaires. Les données ont été recueillies dans vingt-cinq villes européennes situées dans huit états : Allemagne, France, Belgique, Espagne, Grèce, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suisse.
Suite aux premières observations, l’organisation non gouvernementale (ONG) s’inquiète en premier lieu pour les femmes enceintes. Deux tiers d’entre elles n’ont pas eu accès à des soins prénataux, et 43 % y ont eu accès trop tard, or, plus de « 70 % d’entre elles nécessitaient des soins urgents ou assez urgents ». Dans son rapport, l’ONG préconise également « l’accès inconditionnel […] aux vaccinations essentielles des enfants qui aujourd’hui ne sont toujours pas assurées ».
Pas de soins pour les clandestins en Espagne
Une profession est également touchée par la précarité alors que les employés mettent leur santé en danger à chaque instant. 1 073 mineurs ont consulté l’un des centres de MdM en 2013 : les médecins ont alors pu constater que « seul un mineur sur deux, au mieux, est vacciné contre le tétanos, l'hépatite B, la rougeole ou la coqueluche. Dans certains pays, ce taux est inférieur à 30%, ce qui est bien en-deçà des taux de couverture vaccinale de la population générale, qui se situent autour de 90 % ».
Au final, seul un point positif ressort de ce rapport et concerne la France : « le seuil de revenu pour accéder à la gratuité des soins a été relevé, ce qui se traduit par une couverture médicale totale pour 600.000 patients supplémentaires », rapporte l’ONG. Les réjouissances sont de courtes durées lorsque les médecins pointent la bête noire de tout état : la prise en charge des « groupes déjà fragilisés avant la crise – ressortissants européens démunis, migrants sans papiers, demandeurs d’asile, usagers de drogues, travailleur(se)s du sexe et sans-abris ». Ces personnes connaissent « une réduction, voire une privation des éléments de sécurité et des réseaux qui leur assuraient une assistance de base ».
Le cas de l’Espagne choque particulièrement. En février dernier déjà, le gouvernement espagnol adoptait une loi interdisant l’avortement sauf en cas de danger ou de viol (sur présentation d’une plainte). Aujourd’hui, le rapport indique que « les immigrés adultes sans papiers ont été exclus des soins depuis le Décret-loi royal 16/2012, entré en vigueur en septembre 2012 ».
76 % des minorités ethniques agressées
Médecins du Monde déplore que ces alertes ne soient pas entendues. L’ONG constate en effet qu’ « en Grèce, les agressions brutales et les crimes de haine contre les minorités ethniques que nous avions rapportés l'année dernière sont loin d'avoir disparu ». Les médecins illustrent leur propos par l’exemple de mineurs grecs ayant subi des actes de violence racistes ou des témoins d’actes visant leur parents.
Au final, 76 % des personnes interrogées reconnaissent avoir déjà été victimes de violences. Pire encore, plus d’un quart des patients reçus dans ces centres ont un diagnostic plus qu’alarmant. Leur état de santé est mauvais à très mauvais, mais ces personnes n’ont pas la possibilité ni les moyens de se soigner. Médecins du monde martèle donc sans relâche son message : des systèmes de santé nationaux ouverts à toute personnes vivant dans l’Union Européenne, sans distinction aucune.