Coloniser Mars : mission suicide !
Rédigé par Laure Hanggi , le 15 October 2014 à 16h35
Mars One veut envoyer ses premiers colons aux alentours de 2025.
Des étudiants-chercheurs en aéronautique du Massachusetts Institute of Technology (M.I.T.) se sont intéressés de près au projet Mars One qui prévoit de coloniser Mars dès les années 2020. Selon eux, cette mission, très médiatisée, serait surtout suicidaire.
Mars One : une mission sans retour
Mars One est une société hollandaise dont le PDG et cofondateur, Bas Lansdorp, a le projet de coloniser la planète Mars d'ici quelques années, sans retour possible pour les colons. Malgré cette perspective quelque peu angoissante, plus de 200 000 personnes ont répondu, en avril 2013, à l'appel à candidature lancé par la société. En théorie, la mission consiste en la colonisation progressive de Mars aux alentours de 2025. Jusqu'à présent, uniquement des missions robotiques menées par la Nasa ont foulé le sol de la planète rouge.
Bien qu'un certain engouement teinté de curiosité ait entouré l'annonce de ce projet, beaucoup de scepticisme entoure sa mise en place, malgré le soutien porté par le lauréat néerlandais du Nobel de physique en 1999, Gerard't Hooft. Et pour cause, parmi les obstacles à surmonter, on peut citer la production d'oxygène, de nourriture, ainsi que la question de l'eau. De plus, Mars possède un environnement hostile dont l'atmosphère est constituée de dioxyde de carbone et où la température moyenne est de -63 degrés Celsius. Les pionniers, qui auront subi des radiations cosmiques dangereuses pendant le voyage, devront faire face à ces problèmes dans des états de santé incertains,
Face à ces constats, des étudiants du MIT (États-Unis) ont analysé très sérieusement toutes les données relatives à cette mission. Les conclusions qu'ils en ont tirées ne sont pas réjouissantes. En effet selon eux, si les colons réussissent à arriver sur Mars, ils se pourraient bien qu'ils n'y restent pas vivants très longtemps.
68 jours pour survivre
Selon les résultats de cette étude parue mardi 14 octobre, le projet de colonisation de Mars tel que l'envisage Mars One est irréalisable. Ainsi, la mort du premier pionnier devrait survenir « approximativement au bout de 68 jours, par asphyxie », selon le rapport de 35 pages qui a analysé mathématiquement les ressources à disposition des colons. Cette mission, censée être auto-suffisante, pourrait bien s'éteindre très rapidement.
En effet, selon les chercheurs, la quantité d'oxygène dégagée par les plantes devant nourrir les colons sera trop importante et la technologie pour équilibrer l'atmosphère « n'a pas encore été développée ». Or, une trop grande quantité d'oxygène dans un milieu fermé peut être toxique et entraîner des explosions (si ce n'est des combustions instantanées). Ceux qui auraient, par chance survécu, à ce premier problème ne seront pas pour autant sortis d'affaire. Les auteurs de l'étude affirment en effet que les quantités de nourriture apportées ne seront pas suffisantes. La production de nourriture serait trop lente et les ravitaillements trop espacés. Il faut en effet 7 mois pour rejoindre Mars depuis la Terre.
De plus, le matériel pourrait venir à manquer, les colons étant dépendants des envois de pièces détachées et de rechange. Or, il faudrait envoyer de 6 à 15 fusées Falcons (les plus grosses d'entre elles) avant l'arrivée des astronautes pour que tout le matériel nécessaire soit là avant l'arrivée des colons.
À bon entendeur
Pour les auteurs du rapport, celui-ci doit être pris en compte pour que ce projet devienne réalisable. « On ne dit pas que coloniser Mars est impossible dans l'absolu, mais simplement que la chose n'est pas faisable avec les hypothèses posées par Mars One », explique Olivier De Weck, professeur en aéronautique, astronautique et ingénierie des systèmes au MIT.
Des conclusions qui ne sont pas partagées par l'homme à l'origine du projet, Bas Lansdorp. Dans le magazine Popular Science, il affirme que le MIT a utilisé des données incomplètes : « J'ai parlé avec des gens très compétents qui m'assurent que ces technologies vont fonctionner ». Parmi celles-ci, celle concernant la filtration de l'oxygène « doit encore être testée mais la technologie est là », déclare-t-il à l'AFP. Les scientifiques rétorquent que l'on ne peut être certain que la technologie fonctionnera également sur Mars.
Lansdorp concède toutefois que la question des pièces détachées est un vrai problème (elles occuperaient plus de la moitié du poids des fusées), et qu'il n'existe toujours pas de fusées et de capsules pour transporter les colons.
Ce qui est certain, c'est que cette mission sera chère (au moins 4,5 milliards d'euros) et qu'elle sera financée par la télé réalité. Un accord a ainsi été signé en juin avec Endémol, pour une émission suivant le processus de sélection et d'entraînement des futurs colons.
Pour ceux qui seraient toujours tentés par l'aventure, une première équipe de 4 volontaires devrait être envoyée en 2024 pour poser les bases de la colonisation (si les fusées transportant le matériel, envoyées précédemment, sont bien arrivées). 4 autres personnes devraient ensuite rejoindre la colonie tous les deux ans jusqu'en 2033, formant un groupe d'une quarantaine de personnes.