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Etre gaucher : un handicap social et professionnel ?

Rédigé par , le 10 December 2014 à 14h55

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15 % de la population française serait gauchère.

15 % de la population française serait gauchère.

Un économiste de la prestigieuse Université de Harvard (États-Unis) a publié une étude selon laquelle les gauchers auraient, en moyenne, des revenus très inférieurs à ceux des droitiers. Cet écart s'expliquerait selon ce chercheur par des différences de facultés cognitives et comportementales, dont la latéralité gauchère serait une manifestation.

Un constat : une différence de revenu importante

Joshua Goodman, un économiste à la Kennedy School de l'Université d'Harvard (États-Unis) s'est intéressé aux différences sociales existant entre les gauchers et les droitiers. Il a ainsi analysé 5 bases de données anglaises et américaines, datant des années 1970, qui avaient la particularité de contenir un très grand nombre d'informations, telles que le revenu, le niveau d'éducation, des résultats à des tests d'aptitude, ainsi que la latéralité des personnes.

Parus dans le Journal of Economic Perspectives, les résultats des recherches de Goodman affirment que les personnes gauchères, qui représenteraient entre 11 et 13 % de la population, auraient un salaire moyen inférieur de 10 à 12 % à ceux des droitiers. En d'autres termes, les hommes gauchers gagneraient environ 2 500 dollars en moins que les hommes droitiers par an. Un fossé encore plus important dans le cas des femmes, qui gagneraient jusqu'à 3 400 dollars de moins. 

Une différence conséquente pour un phénomène dont l'origine est aujourd'hui encore méconnue. Si les principales thèses avancées s'orientent vers une explication génétique, la ou les causes déterminantes dans la latéralité sont toujours inconnues. On sait néanmoins que les droitiers et les gauchers ont des différences de « câblages » sur le plan neurologique.

Le gaucher : un faux génie ?

L'autre conclusion tirée par Joshua Goodman découle de l'analyse des tests de Q.I. et d'aptitude passés par les membres des différents panels. Selon lui, entre 20 à 28 % des gauchers seraient « intellectuellement déficients », soit le double de la moyenne de la population globale. En effet, il semblerait que les gauchers aient été moins performants aux tests auxquels ils ont été confrontés. L'étude affirme ainsi que « les gauchers ont plus de problèmes émotionnels et comportementaux, [ainsi que] davantage de difficultés d'apprentissage, comme la dyslexie ». Une situation qui impacterait leur parcours éducatif et professionnel par la suite, expliquant ainsi la différence de revenu.

Ces résultats remettent en cause nombre d'idées reçues, selon lesquelles les gauchers seraient plus intelligents et talentueux que la moyenne. Pour Goodman, les gauchers « exceptionnels » seraient en réalité une minorité.

Pour Joshua Goodman, les gauchers "exceptionnels" ne seraient pas représentatifs de l'ensemble des gauchers.

Pour le chercheur, le fait d'être gaucher pourrait en fait être une manifestation de troubles de la santé et/ou du développement dans les premiers instants de la vie. En effet, l'environnement joue également un rôle important dans la détermination de la main prédominante chez l'enfant. Celle-ci n'est pas, contrairement à ce que l'on pense communément, la seule conséquence de facteurs génétiques, comme on peut le voir chez une partie des vrais jumeaux, qui ont une latéralité différente.

Le problème n'est pas d'être gaucher

Comme l'indique Joshua Goodman, les résultats de cette étude ne doivent pas amener à penser que le fait d'être gaucher est un handicap social en lui-même. « Le fait d'être gaucher [n'est pas] la raison de cet écart. C'est une piste qui mène aux véritables raisons : un poids moindre à la naissance (ou des complications) est associé au fait d'être gaucher. Ces problèmes de santé peuvent avoir des effets à long terme ».

Une affirmation renforcée par la conclusion la plus surprenante de l'étude : les écarts de revenu et les difficultés que peuvent connaître les gauchers ne concernent que ceux dont la mère était droitière. Les gauchers dont la mère était également gauchère ont obtenu quasiment les mêmes résultats aux tests que les droitiers. Ceci pourrait s'expliquer par le fait que les enfants qui ont une latéralité différente de leur mère auraient du mal à apprendre d'elle par imitation, perturbant ainsi leur processus d'apprentissage. Selon Peter R. Ozszag, du journal Bloomberg, l'enfant serait ainsi « embrouillé » par son modèle de référence. Un enfant gaucher, issu d'une mère gauchère, aurait au contraire un exemple sur lequel s'appuyer pour évoluer dans un monde construit pour les droitiers.

Si la pratique est aujourd'hui beaucoup moins courante, les gauchers ont pendant longtemps étaient contraints d'apprendre à écrire de la main droite. Ces gauchers contrariés sont plus susceptibles de développer des troubles tels que le bégaiement, des dyslexies ou des strabismes durant l'enfance, qui peuvent perturber l'apprentissage et le développement cognitif.

Ainsi, selon cette étude, le fait d'être gaucher serait en fait une manifestation « par procuration » d'autres troubles. Des résultats qui doivent bien sûr être confirmés et approfondis, afin de pouvoir affirmer avec certitude ce lien de causalité.

Aujourd'hui en France, près de 15 % de la population est gauchère.

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L'auteur
Laure Hanggi

Laure Hanggi

Rédactrice

Bio

Etudiante en histoire passionnée d'actualité en général et notamment des questions de santé moderne, en tant qu'enjeux de société. Voir plus

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