Et si dans 5 ans les laboratoires cultivaient les pénis pour les greffer ?
Rédigé par Laure Hanggi , le 09 October 2014 à 14h56
L'institut de Wake Forest est un des leaders de la médecine régénératrice.
Des chercheurs de l'Institut américain de médecine régénératrice de Wake Forest en Californie affirment que d'ici 2020, il sera possible de greffer des pénis créés en laboratoire. Un véritable espoir pour les hommes souffrant de lésions cancéreuses ou de malformations congénitales.
L'aboutissement de longues années de recherche
Depuis 1992, un groupe de chercheurs de près de 300 personnes travaille afin d'étudier la possibilité de créer artificiellement un pénis en perspective d'une greffe. En 2008, l'Institut de Wake Forest où travaillent ces chercheurs parvient à prouver qu'une telle opération serait réalisable chez l'homme. Cet Institut, qui fait partie des leaders de la médecine régénératrice, s'est illustré durant les années 2000 dans plusieurs cas de reconstruction d'organe.
Dès 1999, ils réussissent à implanter pour la première fois au monde un organe cultivé en laboratoire avec succès. Cet organe, une vessie, sera le premier d'une longue liste comprenant des reins, des cœurs et même des vagins. 30 zones différentes du corps ont ainsi fait l'objet de ces opérations régénératrices.
Désormais, les chercheurs de cet institut ont pour objectif de réaliser une greffe de pénis créé en laboratoire. Depuis plusieurs années, de nombreuses expériences ont été menées. Selon le directeur de cette équipe, Anthony Atala, les recherches menées sur les animaux depuis 2008 sont très « encourageantes ». En effet, l'équipe a réussi à concevoir et à greffer 12 pénis fonctionnels sur des lapins : «Tous ont essayé de s'accoupler avec une femelle, huit ont réussi à éjaculer et quatre ont ensuite obtenu une progéniture». Ces résultats positifs sont le fruit d'un processus de création bien particulier.
Le principe de la reconstruction
Les chercheurs ne partent pas de rien pour créer ces organes, en l'occurrence ici, un pénis. Après avoir obtenu le pénis d'un donneur, celui-ci est vidé de toutes ses cellules. Une structure en collagène est alors créée et ensemencée avec du tissu musculaire et des cellules issus du bénéficiaire de la greffe. James Woo, un des membres de l'équipe scientifique, explique l'opération dans le Guardian : « Imaginez cela comme s'il s'agissait d'un bâtiment. Si vous enlevez les meubles et les gens, il reste toujours la structure principale du bâtiment. Ensuite, vous remplacez les anciens locataires par de nouveaux. C'est l'idée. Sauf que le bâtiment est un pénis, et les habitants des cellules.»
Ce procédé présente un double avantage. Tout d'abord, il serait moins bouleversant sur le plan psychologique chez le greffé. En effet, en 2005, le premier homme à s'être fait greffer un pénis (d'un donneur) avait demandé à ce qu'il lui soit retiré, deux semaine après l'opération. Le Docteur en charge de la greffe avait alors évoqué les « sévères problèmes psychologiques rencontrés par le bénéficiaire et sa femme ». De plus, le risque de rejet et les problèmes de compatibilité seraient quasiment nuls, l'utilisation des cellules du porteur limitant l'impact de l'intervention. 6 semaines sont nécessaires à la création d'un pénis fonctionnel, le temps que les cellules soient mises en culture et cultivées.
Une opération pour qui ?
Cette opération de reconstruction de pénis viserait les hommes souffrant de déformations congénitales, de lésions suites à un cancer ou de troubles érectiles. Les cellules des greffés étant nécessaires à la reconstruction de l'organe, les personnes voulant changer de sexe ne pourront pas bénéficier de cette procédure.
Comme le remarque The Guardian, le travail de cette équipe de chercheurs s'inscrit au sein d'une réflexion globale. Dans une société en proie au vieillissement de sa population et où les dons d'organes ne sont pas suffisants, générer artificiellement des organes relève d'une nécessité.
L'Institut de Wake Forest attend la validation et l'approbation de son projet par la FDA (agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux) pour pouvoir effectuer des tests sur les humains. Pour cela, les chercheurs devront démontrer la non-dangerosité de l'opération et détailler chaque étape de la fabrication. L'approbation de ce projet pourrait signifier une amélioration considérable du quotidien pour des personnes victimes de malformations ou de troubles péniens.