« Greffe de vie » : l’association qui bat pour promouvoir le don d’organe
Rédigé par Céline Le Goff , le 02 June 2014 à 18h00
La fondation Greffe de vie milite pour que le don d'organe soit plus répandu en France.
Depuis 2005, l’association « Greffe de vie », reconnue d’utilité publique, se bat au quotidien pour que le don d’organe soit plus répandu et connu dans la société. Allo-Médecins a pour vous interviewé Jean-Pierre Scotti, le président et fondateur de l’association.
« Don d’organes. Vous avez fait votre choix. Dites-le simplement à vos proches. Maintenant » scandait la campagne de sensibilisation et de réflexion sur la greffe et le don d’organe l’année dernière. Seulement, d’un point de vue légal, cela n’a aucune incidence et c’est aux proches de la victime que revient la décision. L’association « Greffe de vie » milite pour faire une campagne du « non » plutôt qu’une campagne du « oui ». Explications avec son président Jean-Pierre Scotti :
Allo-Médecins : Que dit la loi aujourd’hui sur le don d’organe ?
Jean-Pierre Scotti : La loi bioéthique mise à jour en 2004 explique que si l’on est opposé au don d’organe, nous devons nous inscrire sur le registre des refus [ formulaire à télécharger sur le site de l’Agence de biomédecine ]. Dans le cas contraire, toute personne qui n’a pas fait part de son refus est supposée consentir au don de ses organes après sa mort. La carte de donneur n’a pas de valeur légale et il n’existe pas de registre du « oui ».
A-M : Si le potentiel donneur n’a pas fait part de sa volonté, qui décide ?
JPS : S’il n’est pas inscrit dans le registre du refus, nous devons nous enquérir auprès des proches de son éventuelle opposition de son vivant. Souvent, il n’en a pas parlé et c’est aux proches de prendre la décision dans la douleur. Seulement, la définition de « proches » n’est pas précisée, c’est à la famille génétique de décider alors que dans certains cas la famille n’est pas proche du défunt.
A-M : Pour quoi l’association « Greffe de vie » milite-t-elle ?
JPS : Le taux de refus de dons augmente depuis ces dernières années, avec plus de 33 % alors que l’on estime qu’à 15-20 % le nombre de personnes contre le don d’organe pour des raisons d’éthique ou de religion.
A terme, sous réserve que la loi soit connue par tous les français, nous militons exclusivement pour le registre du refus. Dans deux, trois, quatre ans même, toute personne non inscrite dans le registre du refus serait « prélevable ». 1 200 personnes s’inscrivent tous les ans sur la liste d’attente pour recevoir une greffe alors qu’entre 2012 et 2013, il n’y a eu que 120 greffes de plus. Il faut trouver une solution.
Seul 13 % des gens connaissent la loi actuelle. Il faut faire des campagnes massives, en insistant sur le fait que donner ses organes est un acte de solidarité sans contrainte puisque nous pouvons dire non si nous le souhaitons.
A-M : Ce système existe-il dans d’autres pays ?
JPS : Non, les pays comme l’Espagne et le Portugal ont le registre du refus mais ils doivent aussi poser la question à la famille. Le don en Espagne, par exemple, fonctionne mieux qu’en France car l’Etat participe aux frais d’obsèques en donnant de l’argent aux familles. C’est un moyen déguisé de rémunérer le don. Cela n’arrivera jamais en France, la gratuité et l’anonymat sont validés par tout le monde et sont des principes non négociables.
A-M : L’anonymat est-il nécessaire ?
JPS : Oui. Le receveur peut écrire s’il le désire une lettre de remerciement anonyme à la famille du donneur, via l’Agence de biomédecine. Le don doit rester anonyme car il est parfois difficile de savoir à qui le défunt a donné et qui est le receveur. Imaginez qu’il soit un bandit ou que ce soit une personne qui s’est suicidée, le receveur va personnaliser l’individu. En général, personne ne demande à lever l’anonymat car ils n’ont pas vraiment envie de savoir.
A-M : Sommes-nous tous de bons candidats ?
JPS : Non, sur 100 % des personnes en cas de mort encéphalique [les organes vitaux (cœur, foie, reins, poumons) fonctionnent mais le cerveau n’a plus aucune activité, due à une mort brutale], 20 % ne peuvent pas être candidats au don. Par exemple, lorsque l’on découvre que le défunt est ou a été malade. Il n’y a pas vraiment de limite d’âge, ce sont les préleveurs regardent et décident de la qualité de l’organe et s’il est transposable ou non.
En résumé, l’association milite pour une campagne de refus du don d’organe et pour que les personnes qui ne se seraient pas inscrites soient par conséquent directement candidats au don. Elle insiste bien pour expliquer que c’est une solidarité sans contrainte. Pour que cela fonctionne, de grandes campagnes de communication sont nécessaires avec un grand impact médiatique afin que tout le monde connaisse le protocole. Une personne sauve en moyenne trois vies : la probabilité de recevoir est donc trois fois plus importante que celle de donner et personne ne dit non quand il s’agit de recevoir. Si cette loi était adoptée, la France donnerait l’exemple d’une solidarité sans contrainte qui pourrait inspirer nos voisins du monde entier.