Addictions et dépression chez les étudiants en psychiatrie
Rédigé par La Rédaction , le 02 July 2018 à 10h59
Etudiants en psychiatrie, dépression et addictions.
Selon le vieil adage, les cordonniers sont les plus mal chaussés. Cela semble se vérifier pour les internes en psychiatrie. Une étude publiée dans le Journal of Affective Disorders affirme qu’ils consomment plus d’alcool, de tabac, de drogues, d’antidépresseurs et d’anxiolytiques que les étudiants en médecine dans d’autres spécialités.
Une santé mentale fragile et des consommations inquiétantes
Cette étude baptisée Bourbon, conduite par le Dr Guillaume Fond de l’Assistance Publique - Hôpitaux de Marseille, a été menée sur 2 165 étudiants inscrits dans 35 facultés de médecine, soit 8% des internes en France. 302 d’entre eux sont étudiants en psychiatrie. Entre décembre 2016 et mai 2017, ils ont répondu à un questionnaire anonyme. L’âge moyen des participants est de 25,9 ans.
Les chercheurs ont constaté que, parmi les étudiants en médecine, les internes en psychiatrie sont ceux qui fréquentent le plus les cabinets de psychiatres. 33% d’entre eux déclarent avoir consulté un psychiatre. Ils prennent 3,8 fois d’antidépresseurs et 1,8 fois d’anxiolytiques que les étudiants dans d’autres spécialités. Cela traduit une santé mentale plus fragile.
Par ailleurs, les chercheurs ont remarqué des taux de consommation problématique d’alcool, de tabagisme et de recours au cannabis plus importants. 40% des internes en psychiatrie ont des troubles liés à l’alcool contre 32,9% chez leurs collègues. Ils sont respectivement 31,5% et 12% à avoir des problèmes avec le tabac et le cannabis contre 19,4% et 5,2%.
De nombreuses explications à l’origine de la situation actuelle
Les chercheurs avancent plusieurs explications. En tête de liste se trouvent les difficultés liées au manque de moyens dans les établissements de santé. Elles engendrent pression et stress sur les internes en général. Le Dr Guillaume Fond soutient aussi que les étudiants qui choisissent la psychiatrie souffrent souvent de vulnérabilités psychiques. Ainsi, ce choix n’est pas le fruit du hasard.
Il est également essentiel de rappeler que la psychiatrie est la spécialité qui expose le plus les étudiants à des violences physiques et sexuelles. De même, il s’agit de l’unique spécialité en médecine où les patients sont enfermés. Le Dr Guillaume Fond suggère toutefois que les taux de consultation et de consommation d’anxiolytiques plus importants résultent d’une meilleure connaissance des problèmes psychiques et d’un autodiagnostic.
Cette étude ne vise pas à stigmatiser la situation actuelle des étudiants en psychiatrie. Pour le Dr Emanuel Loeb, psychiatre à l’hôpital du Kremlin-Bicêtre à Paris, il existe un surdiagnostic des troubles dépressifs et des consommations abusives en psychiatrie. A l’inverse, ils peuvent être sous-diagnostiqués dans les autres spécialités.