Congeler le sang du cordon ombilical, agir par anticipation
Rédigé par La Rédaction , le 13 December 2016 à 11h30
Le sang contenu dans le cordon ombilical contient des cellules souches.
Garder le sang du cordon ombilical n’est pas un procédé nouveau. La loi permet d’en faire don à la collectivité mais pas de l’utiliser à des fins privées. Pourtant, le tribunal de Grasse vient d’autoriser une femme enceinte à conserver le cordon ombilical de son enfant à naître par anticipation.
Une décision de justice basée sur des nécessités thérapeutiques
Dans son ordonnance datée du 21 novembre, la vice-présidente du tribunal de grande instance de Grasse a accordé aux futurs parents le droit de garder pour leur enfant le sang contenu dans le cordon ombilical. Cette décision est motivée par des nécessités thérapeutiques justifiées au regard des antécédents familiaux du père et de la mère, une première en France.
Le couple de quadragénaires qui va avoir son premier enfant le 18 décembre prochain compte en effet des cas de cancer foudroyants dans leurs familles respectives. Le grand-père maternel est mort d’un cancer du pancréas tandis que la grand-mère paternelle a succombé à un double cancer du foie et du pancréas. Quant au père, il souffre de maladies héréditaires.
Pour la mère, il s’agit d’un cadeau à son enfant s’il venait un jour à développer une pathologie grave. Elle souhaite lui donner la chance de se soigner grâce aux progrès des traitements basés sur les cellules souches. L’avocat du couple qui milite pour faire évoluer la législation actuelle salue également cette décision de justice.
Une décision humaine mais objet de nombreuses controverses
Sur le plan juridique, la loi française stipule que le cordon ombilical est la propriété exclusive de la mère. Ni le père, ni l’enfant ne possèdent des droits sur celui-ci. Jusqu’ici, il n’était possible de prélever le sang du cordon ombilical, riche en cellules hématopoïétiques, que dans le cercle familial et en cas de maladies graves comme la leucémie.
Ainsi, de nombreux spécialistes ne sont pas convaincus du bien-fondé de cette décision. Pour Noël Milpied, chef du service Hématologie et Thérapie cellulaire au CHU de Bordeaux, cette ordonnance sert juste à calmer l’angoisse des parents. Il n’existe pas d’intérêts scientifiques à conserver à des fins autologues des cellules souches porteuses d’anomalies à l’origine d’une pathologie lourde.
Le Pr Ibrahim Yakoub-Agha, Responsable des greffes au CHU de Lille, évoque des questions d’éthique. Cette décision doit profiter à tous. Cependant, il craint qu’en faisant jurisprudence, celle-ci favoriserait le développement des démarches à visée commerciale au détriment de la médecine. En Angleterre où le procédé est légal, des sociétés privées assurent déjà un service de stockage.