Des chercheurs créent un virus extrêmement virulent et résistant
Rédigé par Céline Le Goff , le 04 July 2014 à 11h20
Une équipe de chercheurs de l’université de Wisconsin-Madison menée par le virologue Yoshihiro Kawaoka a recréé une nouvelle version du virus de la grippe H1N1 plus résistante aux traitements disponibles et au système immunitaire. Cette nouvelle a engendré une grande controverse.
La mutation des protéines hémagglutinines, cause de la résistance des virus
Les scientifiques en cause ont réalisé leurs expériences dans un laboratoire de l’université. Ils ont repris des souches du virus de la grippe aviaire qui s’était répandue en 2009 et avait fait 200 000 victimes. Ils ont sélectionné les souches les plus résistantes aux anticorps et les ont modifiées génétiquement pour obtenir une souche particulièrement coriace. Pour réussir, ils ont dû détecter les hémagglutinines, des protéines majeures localisées sur la surface du virus et qui permettent aux particules virales de s’implanter sur les cellules cibles. Ce sont ces protéines qui mutent constamment et qui obligent les chercheurs de renouveler le vaccin contre la grippe tous les ans. En manipulant les hémagglutinines, le professeur Kawaoka a réussi à rendre le virus plus résistant.
Le professeur s’est justifié en expliquant que de telles mutations du virus émergeaient sans cesse dans la nature. Le processus de comprendre comment ces virus évoluent pour échapper aux traitements et défenses immunitaires permettrait de développer des vaccins plus puissant, efficaces contre une gamme plus large de virus. D’autres scientifiques ont apporté leur soutien aux recherches du virologue. Selon eux, le professeur veut anticiper les mutations du virus pour pouvoir mieux les traiter à l’avenir.
Un virus contre lequel la population mondiale serait sans défense
Cependant, la nouvelle a suscité une grande inquiétude après de la population mondiale. Bien que les résultats de la recherche n’ont pas été publiés mais seulement présentés à certains comités d’expert dont l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), un article est déjà paru dans The Independent, dénonçant les actions du laboratoire qui mettent en danger selon eux des centaines de personnes. En effet, ils ont créé un virus pandémique contre lequel la majorité des individus n’auraient aucune défense. Cet article a lancé un débat sur la nécessité de créer des virus pour mieux les étudier. On peut se demander si les bénéfices de la découverte valent de prendre le risque de contaminer la population.
Ce n’est pas la première fois que les recherches de Yoshihiro Kawaoka font polémiques. Son expérience précédente sur la grippe espagnole, le virus le plus mortel de l’histoire, avait divisé la population médicale quant à son utilité. Cependant, les résultats avaient démontré que la mutation du virus espagnol serait vulnérable à certains traitements existants tels que le vaccin contre la gripe aviaire ou le Tamiflu.
Bien que la nouvelle donne des frissons, il ne semble pas y avoir d’inquiétude à se faire puisque le laboratoire de l’équipe universitaire a été jugé aux normes et respecte les réglementations fédérales en matière de biosécurité. Il serait donc peu probable que le virus s’échappe malencontreusement du laboratoire comme cela a déjà été le cas. On garde en mémoire l'affaire révélée en avril dernier de 2000 tubes à essais contenant des fragments du virus SRAS disparus de l'institut Pasteur.