Un colorant qui fait briller les tumeurs pour mieux les retirer
Rédigé par Céline Le Goff , le 27 August 2014 à 11h42
Des chercheurs américains de l’Université de Pennsylvanie ont mis au point un nouveau procédé pour mieux retirer les tumeurs des patients. La technique consiste à utiliser un colorant qui répond aux lumières infrarouges en s’éclairant d’une lumière verte.
Le vert d’indocyanince, le colorant, se concentre dans les cellules cancéreuses
L’ablation d’une tumeur est l’un des meilleurs moyens de guérir d’un cancer lorsque celle-ci est possible. Mais un problème subsiste, qui constitue un véritable talon d’Achille, c’est celui de repérer la tumeur. Les médecins doivent le faire à l’œil ou au contact en palpant avec leurs mains. Il est donc fréquent que certaines cellules cancéreuses ne soient pas retirées lors de l’opération car non détectées par le chirurgien. Ainsi, dans 20 à 50% des cas, les patients sont victimes d’une récidive car les cellules restantes se développent de nouveau.
Les chercheurs de l’Université, associés à une équipe de Penn's Perelman School of Medicine dirigée par Sunil Singhal, un professeur adjoint de chirurgie, ont alors orienté leurs études vers les vertus d’un colorant déjà bien connu pour sa réaction aux lumières infrarouges et agréé par la FDA (Food and Drug Administration) en 1958, le vert d’indocyanine. En injectant cet agent de contraste dans l’organisme des patients par intraveineuse, le colorant se concentre principalement dans les tissus cancéreux. Les tissus touchés absorbent plus cet agent que les tissus sains parce qu’en se développant aussi vite, les tumeurs présentent ce qu’on appelle des « fuites de paroi ».
Ainsi, si le vert d’indocyanine est injecté avant l’opération, les tissus cancéreux seront visibles grâce à une lumière verte lorsque les médecins utiliseront des infrarouges. « Cette technique offre aux chirurgiens un nouvel outil, qui éclaire les tumeurs pendant l’opération », estime David Holt, principal auteur de l’étude. Les risques de récidive sont réduits grâce à ce procédé.
Des essais cliniques sur les animaux et les humains réussis
Pour s’assurer de l’efficacité de la méthode, les chercheurs ont réalisé plusieurs tests cliniques. Le premier consistait à tester l’agent de contraste sur des souris atteintes de cancer aux poumons. A 15 jours de cancer, ils ont injecté le colorant. Les tumeurs étaient alors visibles après 24 jours de cancer. Ensuite, un autre test a été réalisé sur 8 chiens de tailles et de races différentes. Les chercheurs leur ont injecté le vert d’indocyanine la veille de l’opération. Là encore, leurs tumeurs étaient visibles.
Après ces deux essais sur des animaux, les chercheurs ont pu lancer les tests cliniques sur des hommes. 5 patients qui avaient développé un cancer de la cage thoracique ou des poumons ont été sélectionnés. Les chirurgiens ont réalisé une ablation des tumeurs de manière traditionnelle. Puis ils ont éclairé les tissus à la lumière infrarouge. Pour 4 patients, aucune cellule cancéreuse n’était distinguable. Mais pour le 5ème, le vert d’indocyanine a détecté des tumeurs disséminées dans les poumons qui s’éclairaient en vert. « Il s’avère que nous avions un cancer microscopique dans de nombreuses zones du poumon », raconte David Holt. « Sans cela, nous l’aurions qualifié de cancer de stade 1, une maladie locale, et le cancer aurait progressé. Mais grâce à l’imagerie et la biopsie, le patient a subi une chimiothérapie et a survécu. »
Le succès de ces essais a encouragé les chercheurs qui souhaitent répandre la pratique aux hôpitaux pour mieux traiter les cancers et réduire les risques de récidive. Cependant, ce procédé comporte une limite, le colorant est également absorbé par les tissus enflammés. Ainsi, cela équivaut à un risque de confusion entre les tissus enflammés et les tissus cancéreux.