Cancer : guérison en péril avec la perte des revenus pour 60% des malades
Rédigé par Clémentine Billé , le 19 March 2014 à 11h38
Des activités sont organisées en France toute la semaine pour la lutte contre le cancer
A l’occasion de la semaine du cancer, la Ligue dédiée à cette cause publie une étude. 60% des malades connaissent une baisse des revenus. Un chiffre alarmant qui remet en question la bonne guérison de certains malades.
4 millions d’euros : c’est l’objectif à atteindre en termes de dons pour cette semaine dédiée au cancer. Pour l’occasion, la Ligue contre le cancer sort un autre chiffre beaucoup moins réjouissant. 60% des malades connaissent une baisse de revenus.
Pas de remboursments pour "les soins de confort"
Ce chiffre alarmant est tiré d’une étude publiée par cette ligue. Elle a été réalisée sur 2 153 personnes en 2013 afin de « mieux connaître leurs conditions de vie » et les « conséquences sociales et familiales » de la maladie.
L’Institut national du cancer spécifie que certains frais ne sont pas pris en charge à 100%. Il s'agit notamment des éventuels dépassements d'honoraires, du forfait hospitalier, et de quelques soins, médicaments, aliments de régime, petits matériels non pris en charge. Les perruques sont par exemple remboursées à hauteur de 125 euros alors qu’elles coûtent en moyenne 230 euros).
Il peut également s’agir de crèmes pour les personnes qui suivent des radiothérapies ou des séances chez les psychologues par exemple. Pourtant, ce dernier aspect fait presque partie du traitement. Il y a quelques jours Allo-Médecins vous parlait de Peter Gasser, un psychiatre suisse qui effectue des thérapies en administrant du LSD à ses patients atteints du cancer. Certaines personnes, ayant des difficultés à supporter la maladie, sont donc prêtes à tester n’importe quelle expérience pour soulager la douleur et la pression. Nombre des malades ne peuvent se permettre d’avoir une simple thérapie par manque de moyens.
L’Assurance maladie ne prend pas en charge le cancer à 100% comme elle le prétend
La Ligue révèle que les malades issus de milieux modestes doivent réduire leur « dépenses alimentaires et énergétiques » selon l’étude. Au total, 44 % des personnes traitées voient leur foyer être mis économiquement en péril. Sur dix-mois, leurs revenus diminuent de 4000 à 14 000 euros selon les cas.
Un autre aspect est encore plus difficile à combattre car il amènerait à s’attaquer au système de la sécurité sociale. En effet, des ménages connaissent des difficultés financières puisque les arrêts de travail ne sont pas complètement couverts par l’Assurance maladie ou même les mutuelles. Les pertes d’emplois liées à la maladie plongent également dans la précarité certains patients.
La Ligue a apporté 6,2 millions d’euros en aides aux patients en 2013. Ce budget « ne cesse d’augmenter d’année en année », en raison du coût du cancer d’une part, de la crise économique d’autre part selon l’association. Avec ses 717 000 adhérents, elle se présente d’ailleurs comme le "premier financeur privé de la recherche contre le cancer". La collecte de cette semaine est d’autant plus importante face à ces chiffres.
Agnès Lecas, déléguée aux Actions pour les Malades à la Ligue Nationale contre le Cancer a répondu à nos questions. Elle nous éclaire sur les conséquences de ces chiffres alarmants, et l’importance de la semaine contre le cancer.
Allo-Médecins : Certaines personnes arrêtent-elles les traitements à cause de cette baisse de revenus ?
Agnès Lecas : Oui on peut penser que certaines personnes actives avant le cancer et qui ont subi une perte de revenus vont devoir faire des choix sur les dépenses quotidiennes. Cela impacte sur la qualité de vie et de l’observance des traitements. S’il y a des soins qui ne sont pas remboursés comme les soins dits de confort, elles vont faire le choix de ne pas les acheter. Cela a quand même un impact sur le traitement des effets secondaires de la maladie. Tout ce qui traite est pris en charge à 100% par la Sécurité Sociale mais les soins de confort comme les prothèses capillaires quand le malade perd ses cheveux ne sont pas remboursés par l’Assurance Maladie. Il faut donc y mette le prix et quand on n’a pas les moyens, on ne le fait pas. Cela vaut aussi pour l’alimentation. Ce n’est pas un soin mais quand vous voyez que ça pèse énormément sur le quotidien de toute personne aujourd’hui en France parce que le niveau de vie général à augmenté, forcément quand c’est une personne malade qui a des traitements qui ne sont pas remboursés et une baisse de revenus importante, elle va faire le choix de ne pas acheter trop de viande, de fruits et légumes alors que c’est très important pour se remettre d’une maladie.
A-M : En quoi la crise économique a aggravé cette situation ?
A L : Il y a un impact parce qu’il y a une augmentation du niveau de vie mais pas des salaires. En plus quand on a une maladie, on perd son salaire et il faut le gérer en plus de tous les effets de la maladie. La crise a un effet sur la précarisation de ces personnes. Il y a des personnes qui avaient un revenu correct pour la maladie et qui d’un seul coup ont basculé dans la précarité ; Surtout si c’est une personne seule, elle ne peut pas s’appuyer sur son conjoint qui peut avoir un revenu. On voit une augmentation des demandes d’aides financières auprès des commissions rattachées à la ligue, et les motifs c’est des demandes d’aides à la vie quotidienne
A-M : Allez-vous engager des procédures pour faire évoluer la législation sur les arrêts maladies par exemple ?
A L : On alerte à travers différents dispositifs. Bientôt, le rapport de l’observatoire sociétal qui va être remis début avril va faire la lumière sur tous les restes à charge des personnes qui ont une maladie. C’est un moyen aussi d’alerter les pouvoirs publics. Dès qu’on le peut, on prévient qu’il n’y a pas que l’aspect traitement dans la maladie mais il y a aussi l’après : toutes les séquelles de la maladie. Quand on a besoin de prothèses dentaires parce que la personne a perdu toutes ces dents et que la personne n’est plus couverte parce qu’elle n’est plus malade, elle en peut pas les remplacer.
A-M : Quelle aide financière apportez-vous ?
A L : On donne en moyenne 400 euros mais attention, c’est en fonction des dossiers et c’est une fois que toutes les aides légales et extra-légales sont épuisées. C’est alors le dernier recours sachant que nos budgets sont en baisse. On a une baisse des dons et en même temps une demande importante. On est tiraillé pour faire face à l’augmentation de 4% de demandes par rapport à 2012-2013.
A-M : Quelles actions faites-vous pour cette semaine du cancer ?
A L : On a 103 comités départementaux donc chacun localement va organiser ses actions. C’est très varié, cela peut être des manifestations sportives, des lotos, des ateliers culinaires pour sensibiliser sur l’importance de l’alimentation, sur connaître ce que proposent les comités. L’autre aspect très important est la collecte de dons. Notre but est d’aider le maximum de personnes et on ne peut pas le faire sans les dons parce qu’on est totalement indépendants et on ne repose que sur ces dons.
Nous remercions Agnès Lecas pour avoir épondu à nos questions. Vous pouvez visiter le site de la Ligue du cancer et faire un don ici